La méthode du 5S appliquée au domaine du tertiaire et des services

  • Expertise

    14 octobre 2022

La méthode des 5S

La méthode des  « 5S » est une technique de gestion japonaise visant à l’amélioration continue des tâches. Que donne cette pratique appliquée au secteur du tertiaire et des services ? Pour y répondre, quelques notions s’imposent.

Que veulent dire les 5 « S » ?

  • SEIRI en japonais ou SORT OUT en anglais renvoie à la notion d’éliminer ou supprimer l’inutile
  • SEITON en japonais ou SET IN ORDER en anglais renvoie à la notion de ranger ou situer les choses
  • SEISO en japonais ou SHINE en anglais renvoie à la notion de nettoyer ou (faire) scintiller
  • SEIKETSU en japonais ou STANDARDIZE en anglais renvoie à la notion de standardiser ou standardiser les règles
  • SHITSUKE en japonais ou  SUSTAIN en anglais renvoie à la notion de respecter (ou suivre) et progresser. 

Quelles sont les origines de la méthode ?

Contrairement à la méthodologie Lean (1) il est difficile d’attribuer de manière précise la paternité du “5S” (2). Il semble avoir été imaginé au sein de l’entreprise de décolletage Aishin Seiki au Japon dans les années 70. Cette fabrique de pompes de Nishio, ville située dans la préfecture d’Aichi, sur l’île de Honshū, au Japon, est alors appelée « usine-salon » en raison de la propreté extrême des ateliers d’usinage. A l’entrée, les visiteurs étaient même invités à se déchausser et à mettre une paire de pantoufles.

Le “5S” n’a cessé d’évoluer au fil du temps. Bien qu’initialement conçue pour optimiser et standardiser des ateliers de production et appliquée dès les années 1980 au sein de l’usine Toyota, cette méthodologie semble tout à fait applicable au sein du tertiaire y compris au sein de votre propre foyer. Si vous êtes seul(e) avec des jumeaux en bas âge, la méthode est indispensable si vous voulez vous en sortir… ! Si vous avez des ados, ils pourront s’en inspirer pour ranger leur chambre. En revanche, il y une possibilité pour que les cours de pédagogie et de management soient soumis à rude épreuve.

Concentrons-nous plutôt sur les activités de service. Comme je le disais, souvent cantonné aux industries manufacturières jusqu’aux années 2000, le 5S est totalement adaptable à l’ensemble des industries de service ou de prestations intellectuelles, avec, à la clef, une simplification des tâches rendant le travail à exécuter plus facile.

Quel en est le but ?

Le principe en est le suivant : plus l’espace et l’environnement de travail est rangé et propre, moins le cerveau passe de temps à faire attention aux choses inutiles qui le perturbent. Ainsi, il a davantage de temps pour se concentrer sur la réelle valeur ajoutée du travail à exécuter. En résumé : on fait mieux en moins de temps.

Comment cela s’intègre dans une demande croissante de flexibilité ?

Je vous rassure tout de suite, il est vrai que cela demande quelques ajustements comportementaux et rien n’oblige à tout mettre en place d’un seul coup. On peut commencer par les 3 premiers “S” dans un premier temps : commencer par la mise en place et l’assimilation de “Seiri” en supprimant ce qui ne sert pas ou très peu, de “Seiton” pour faire un peu de rangement et de “Seisso” pour effectuer du nettoyage et la suppression de ce qui ne fonctionne ou qui marche pas. Les 2 autres “S” : « Seiketsu » pour standardiser et « Shitsuke » pour respecter (ou suivre) et progresser, ne tarderont pas à être revendiqués.

Comment peut-on l’adapter au tertiaire et secteur des services ?

L’avènement du « tout numérique » a certes facilité les choses. Cependant, il faut savoir éliminer les fichiers qui ne servent à rien ou enregistrés deux fois sous un nom différent, savoir où sont rangés les fichiers, comment les retrouver facilement et comment les exploiter efficacement. C’est facile à dire, mais cela nécessite une certaine méthodologie. Qui n’a pas connu le : « Où est-ce que j’ai mis ce fichu ce dossier ? Ça commençait par “chantier” il me semble. Ah trouvé ! Mince, il est dans “charpente” finalement… ».

Physiquement, il faut également savoir garder son bureau, ainsi que son environnement de travail, ordonné et libre de toute interférence. Lorsqu’on utilise quelque chose, on la remet ensuite à sa place afin d’éviter cette situation familière :
«  – Vous savez qui a pris l’agrafeuse ?
– Non, la dernière fois c’était Pierre qui l’avait, mais je ne sais pas où elle est maintenant… »
.

Les cartons qui trainent au sol, des cordons de téléphone ou de câblage informatique sans protection qui contribuent au : « Mince, mon câble Ethernet est arraché ! », des chaises retirées, sont des facteurs non seulement de perturbation intellectuelle, mais aussi d’insécurité physique des personnes.

Des règles, des indicateurs, des organigrammes, des répertoires d’appel, une liste des « qui fait quoi » rassure et permet de se libérer du temps afin de ne pas se poser la question : « Dis-moi, j’ai besoin d’une attestation pour la garde de mon fils, tu sais qui le fait ? Mon manager me dit que ce n’est pas lui mais la RH. La RH me dit que normalement c’est l’assistante de site qui me renvoie vers le service paie. Mais ce n’est pas le service RH la paie ? ». 

Des véhicules garés dans tous les sens sont, là aussi, vecteurs de perturbation. Dans l’inconscient collectif, tout ce qui n’est pas dans le même sens, perturbe et génère un inconfort physique et intellectuel. C’est une règle de sécurité basique mais ça ne fait pas de mal de le rappeler.

Et après la mise en place du 5S, que se passe-t-il ?

Sur la base d’un management participatif et à tous les niveaux hiérarchiques, le principe est de parvenir à améliorer son environnement. Cela commence par des bacs de tri, des bureaux propres, des chaises rangées (et en bon état) pour le confort de tous, donner une meilleure image du site, éliminer les gaspillages (les 3 fameux MUDA (3) pour les intimes) de matières et de temps, conserver les équipements en bon état et réduire les risques d’accident.

Les salariés tendent à verser davantage d’attention à leur sécurité propre, à l’hygiène des locaux ainsi qu’au respect de certaines fonctionnalités tout en se préservant un peu d’espace pour garder un sentiment d’appartenance à celui-ci. On se concentre de plus en plus sur l’identification des dangers et la mise en place de contrôles préventifs pour assurer la sécurité des équipes pendant la réalisation de leurs tâches et garantir un environnement de travail répondant aux normes de sécurité requises. C’est ainsi que le 6ème « S », (le SAFETY) est apparu. Celui-ci apparaît d’ailleurs de plus en plus fondamental au regard de la situation pandémique que nous venons de traverser.

Jusqu’à récemment cantonné aux ateliers de production, le 5S (ou 6S) s’étale de plus en plus au grand jour. Il se fait connaître : certaines entreprises affichent les indicateurs de performances “Lean” non seulement dans les ateliers mais aussi dans les locaux administratifs pouvant recevoir les clients. L’ensemble de ces éléments contribuent à une image valorisante de l’entreprise envers des clients potentiels et des candidats convoités.

Un œil à minima averti remarquera d’emblée le sens des véhicules garés sur le parking ainsi que toutes les petites choses qui dépassent. Autant le client que le candidat ou le collaborateur, se sentiront en sécurité et en confiance face à un environnement ordonné et rangé. Le client en ressentira un sentiment de sérieux dans la réalisation des tâches et du respect qui sera dédié à sa commande, le collaborateur lui, sera conquis par une ambiance de travail sécurisé témoignant de la prise en considération de son bien-être.

Dans un ensemble de bureaux partagés, d’espaces semi-ouverts où les zones de détente ont tendance à côtoyer les espaces de travail, les principes du 5S prennent tout leur sens lorsqu’il s’agit de respecter la tranquillité et la qualité du travail de chacun. Ne dit-on pas : « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres » ? Cet adage est à mettre en perspective avec la prise d’autonomie grandissante des nouvelles générations et la nécessité d’établir des règles au sein de l’organisation. Même la flexibilité a besoin d’un cadre et, trouver un juste milieu entre ces règles de vie et une demande croissante de souplesse et d’autonomie, oui, c’est possible. Et tout le monde y gagne !

 

Bibliographie

(1) Les outils de Lean Management 

(2) Origine des 5S

Méthode des 5S 

(3) Méthode MUDA – réduction des gaspillages par le management visuel

Ressources : illustration @Freepik

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